Sarkozy soutient Barroso pour un nouveau mandat à la Commission
Nicolas Sarkozy, président en exercice de l'UE, s'est dit jeudi favorable à un nouveau mandat du Portugais José Manuel Barroso à la tête de la Commission européenne à partir de 2009.
"Si la question est de savoir si j'ai un candidat (pour le poste de président de la Commission à partir de l'automne 2009), la réponse est oui. Si la question est de savoir s'il est assis à la même table que moi la réponse est également oui", a dit M. Sarkozy lors d'une conférence de presse, assis aux côtés de M. Barroso, à qui il faisait clairement référence.
M. Sarkozy s'exprimait au Parlement européen de Strasbourg, après avoir présenté aux élus les priorités de la présidence française de l'UE.
Ancien Premier ministre portugais, M. Barroso dirige l'exécutif européen depuis 2004. Son mandat arrive à échéance l'an prochain. Il n'a jamais fait part publiquement de ses intentions, mais son entourage a clairement fait savoir qu'il briguait un second mandat.
Devant la presse, il s'est borné à dire que le choix du futur président de la Commission "est une décision à prendre par les différents partis politiques" représentés au Parlement européen, qui auront leur mot à dire dans la désignation du titulaire du poste par les chefs d'Etats et de gouvernement européens.
Prudent, M. Barroso ne s'en est pas moins présenté en rassembleur devant la presse. "La Commission n'est pas comme un gouvernement national" qui peut ne dépendre que de la majorité d'un seul parti au Parlement, "la Commission sera toujours par définition une grosse coalition", a-t-il ajouté, en référence au gouvernement de coalition en Allemagne entre conservateurs et sociaux-démocrates.
M. Sarkozy a affiché publiquement son soutien pour M. Barroso malgré des tensions récentes entre la France et l'exécutif européen, sur les négociations à l'OMC, la grogne des Européens face au pétrole cher ou les pêcheurs.
Paris a reproché, au moins en privé, l'inaction ces derniers mois de la Commission européenne face aux difficultés provoquées par l'envolée des prix du carburant, se plaignant que Bruxelles rejette d'un revers de main son idée d'un plafonnement de la TVA sur les produits pétroliers.
Finalement, un compromis a été trouvé. Tout en restant très dubitative, la Commission a accepté d'évaluer l'impact d'une telle mesure.
Autre geste en direction de la France: M. Barroso a par ailleurs pesé de tout son poids pour faire passer un plan d'aide d'urgence aux pêcheurs européens touchés par la hausse du prix du gazole, contre l'avis de certains de ses collègues commissaires.
Et il vient de proposer d'élargir la liste des produits et services pour lesquels les Etats peuvent décider d'appliquer un taux réduit de TVA, notamment à la restauration, un thème cher à la France.
Cheval de bataille depuis 2002 de la France, la TVA réduite dans la restauration était une promesse de Jacques Chirac, reprise depuis par Nicolas Sarkozy.
Le clivage reste en revanche entier entre le chef de l'Etat et la Commission actuelle sur deux sujets: la BCE, critiquée par M. Sarkozy mais que défend M. Barroso, et les négociations commerciales à l'OMC.
M. Sarkozy a accusé publiquement le commissaire européen au commerce Peter Mandelson, négociateur de l'UE, de mettre en danger l'agriculture de l'UE par ses concessions sur la baisse des subventions.
Sarkozy: "le compte n'y est pas" pour un accord à l'OMC
Le chef de l'Etat français Nicolas Sarkozy, président en exercice de l'UE, a estimé jeudi que "le compte n'y est pas" aujourd'hui pour un accord à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) sur la libéralisation des échanges.
"Nous sommes unanimes en Europe (...) pour dire qu'en l'état actuel des choses le compte n'y est pas, que l'Europe a fait tous les efforts, que l'Europe ne peut pas continuer à faire des efforts si les autres grandes régions du monde ne sont pas décidées à avancer", a-t-il déclaré devant le Parlement européen à Strasbourg.
"Le Brésil n'a fait aucun effort sur la baisse des barrières tarifaires dans l'industrie", il n'y a "aucun effort sur les services et que dire de la fermeture du marché chinois", a-t-il ajouté.
Une réunion ministérielle des principales puissances commerciales mondiales est prévu à partir du 21 juillet pour tenter de conclure les laborieuses négociations à l'OMC. Elle est considérée comme celui de la dernière chance.
Les ministres européens chargés du Commerce doivent auparavant se réunir le 18 juillet à Bruxelles pour définir la position de l'UE.
Nicolas Sarkozy a déjà adressé à plusieurs reprises ces dernières semaines des critiques à l'encontre du commissaire européen au Commerce Peter Mandelson, qui mène les négociations au nom de l'UE.
La semaine dernière, il avait affirmé qu'il ne "laisserait pas faire" un accord à l'OMC qui sacrifierait la production agricole "sur l'autel du libéralisme mondial".
M. Mandelson avait déploré en retour les attaques de Nicolas Sarkozy, estimant qu'elles auraient pour effet de limiter la capacité de l'UE "à défendre (ses) intérêts".
"Quand j'entends ce que dit le président (de la Commission européenne José Manuel) Barroso, quand j'entends ce que dit le Premier ministre du Canada, et même (la chancelière allemande) Angela Merkel, ils disent aujourd'hui que le compte n'y est pas", a insisté jeudi M. Sarkozy.
"Il n'y a pas d'exception française de ce point de vue", a-t-il ajouté. "Je n'ai entendu personne, y compris le gouvernement britannique, dire qu'il faut signer en l'état actuel de la négociation".
"L'accord est préférable que le non accord. Mais que l'on ne vienne pas dire que, sans accord, il ne peut pas y avoir de croissance", a-t-il par ailleurs ajouté.
"Cela fait sept ans qu'il n'y a pas d'accord. Et pendant six ans le monde a connu une croissance sans précédent".
Les pays membres de l'OMC peinent depuis 2001 à se mettre d'accord sur une baisse généralisée des barrières douanières, dans le cadre du cycle de négociations de Doha.
Insatisfaite de l'état actuel des négociations, Paris, suivi par un certain nombre de pays européens, reproche à M. Mandelson d'avoir fait trop de concessions en matière agricole et de ne pas en avoir obtenu suffisamment en échange dans les domaines des produits industriels et des services.
Sarkozy persiste et signe dans ses critiques contre la BCE
Le chef de l'Etat français Nicolas Sarkozy a persisté dans ses critiques contre la récente hausse de taux de la BCE, jugeant légitime de débattre de la meilleure stratégie monétaire ou de change à mener pour l'Union européenne.
"On ne met pas en cause l'indépendance de la BCE en s'interrogeant sur le fait de savoir s'il est raisonnable qu'on porte les taux d'intérêt à 4,25% alors que les Américains ont des taux d'intérêt à 2%".
"L'Europe a souffert d'un manque de débat. Nos institutions sont indépendantes. Mais l'indépendance ne veut pas dire l'indifférence", a-t-il ajouté.
Il a appelé les responsables politiques à avoir "le courage de débattre" sur le point de savoir "quelle est la bonne stratégie économique, quelle est la bonne stratégie monétaire, quelle est la bonne stratégie des taux de change, quelle est la bonne stratégie des taux d'intérêt".
"Bien sûr, chacun, et je le dis à nos amis allemands notamment (qui défendent bec et ongles l'indépendance de la BCE, ndlr), chacun peut avoir sa propre conviction. Mais personne n'a le droit d'empêcher un débat qui est utile", a-t-il dit.
Pacte de sécurité de Medvedev: Sarkozy se dit "intéressé"
Le président français Nicolas Sarkozy s'est dit jeudi "intéressé" par la proposition de pacte de sécurité européen du président russe Dmitri Medvedev, qui pourrait contribuer à "apaiser les relations" entre l'Union européenne et la Russie.
"Je suis intéressé par cette proposition de sécurité de Vancouver à Vladivostok", a déclaré M. Sarkozy lors d'un point presse après sa première intervention devant le Parlement européen en tant que président en exercice de l'UE.
"Tout ce qui permettra d'apaiser les relations entre Russie et Union européenne doit être encouragé", a-t-il ajouté, en précisant que ce pacte avait été évoqué lors du récent sommet du G8 au Japon.
Dans un discours à Berlin début juin, le nouveau président russe avait proposé un "pacte régional" de sécurité européen, et proposé à cette fin "un sommet européen pendant lequel on pourrait commencer l'élaboration d'un tel traité".
Il en avait reparlé fin juin au sommet UE-Russie en Sibérie, en soulignant qu'il y avait "toute une série d'organisations qui essaient de résoudre" les problèmes de sécurité en Europe - comme l'OSCE ou l'Otan - mais qu'aucune ne s'en était montrée capable.
Les dirigeants de l'UE présents à ce sommet avaient alors déjà jugé l'initiative intéressante mais encore "en gestation".
Non irlandais: Sarkozy espère proposer une solution à la fin de l'année
Le président en exercice de l'Union a déclaré qu'il espérait proposer une solution au non irlandais au traité européen de Lisbonne "soit en octobre, soit en décembre".
"J'irai le 21 juillet en Irlande pour écouter et dialoguer et essayer de trouver des solutions", a rappelé M. Sarkozy lors de sa première intervention devant le Parlement européen à Strasbourg depuis le début de la présidence française de l'UE, le 1er juillet.
"La présidence française va proposer une méthode et je l'espère une solution soit au mois d'octobre, soit en décembre", a-t-il ajouté.
"Il faut à la fois ne pas bousculer les Irlandais et en même temps savoir dans quelles conditions et avec quel traité nous allons organiser les élections européennes" de juin 2009, a-t-il expliqué.
"Il reste un peu de temps, mais pas beaucoup de temps", a-t-il ajouté.
Le président français a souligné qu'il n'y avait pas d'autre traité possible que celui de Lisbonne - censé permettre à l'UE de mieux fonctionner à 27- à moins de maintenir en vigueur le traité actuel, celui de Nice.
Dans ce contexte, M. Sarkozy a une nouvelle fois exhorté le président polonais à "honorer" sa parole en ratifiant le traité de Lisbonne, après que Lech Kaczynski eut indiqué qu'il refusait de signer le texte en l'état et ne le ferait que si l'Irlande l'approuvait dans un nouveau référendum.
"Il a négocié lui-même le traité de Lisbonne", a dit M. Sarkozy, "il a donné sa parole, une parole ça doit s'honorer, c'est une question de morale".
Le chef de l'Etat français a également à nouveau prévenu qu'à ses yeux l'UE ne pourrait continuer à s'élargir sans mise en place du traité de Lisbonne.
Il a assuré qu'il ne voulait "laisser personne derrière" et que "l'Europe à plusieurs vitesses ne peut être qu'un dernier recours".
M. Sarkozy a rappelé les grandes priorités des six mois de présidence française, à commencer par l'adoption avant décembre par les Etats membres et le Parlement du paquet de mesures proposé en janvier par la Commission européenne pour lutter contre le réchauffement climatique.
"Si chaque pays commence à renégocier le point qui le gêne, nous n'arriverons jamais à un accord, c'est pour cela que nous demandons au Parlement de se mobiliser à nos côtés pour que d'ici décembre le paquet soit adopté", a-t-il déclaré.
Aux députés de gauche, souvent méfiants envers le "pacte pour l'immigration" - autre priorité de la France pour renforcer la lutte contre l'immigration - il a fait valoir que c'est en se dotant d'une politique européenne qu'"on sort de débats nationaux où les extrêmes utilisent la misère des uns et la peur des autres au service de valeurs qui ne sont pas les nôtres".
Sarkozy plaide pour une "exception sportive" en Europe
Le président français a plaidé pour une "exception sportive" en Europe, "comme il y a une exception culturelle".
"J'aimerais qu'il y ait en Europe une exception sportive comme il y a une exception culturelle. Je n'accepte pas l'idée qu'on vienne piller nos clubs de foot en détruisant l'effort de formation que font certains de nos clubs" en venant "chercher des garçons de 14 ans", a affirmé M. Sarkozy.
Il a dit souhaiter "une exception sportive qui dirait que le sport ne répond pas seulement à l'économie de marché".
C'est une "grave erreur de ne pas parler de sujets qui concernent le quotidien des Européens", a également regretté M. Sarkozy.
"Il y a une exception culturelle européenne, le monde ne doit pas être aplati devant une seule langue, une seule culture", a-t-il ajouté, en estimant notamment que "la question de la fiscalité sur le disque ou sur le livre (devait) être posée".