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Un Républicain de Guingamp

Site de Philippe LE ROUX, ancien Délégué de la quatrième circonscription des Cotes-d'Armor et Conseiller chargé des grands projets auprès de la Direction de l'UMP

Fadela Amara : « Il est bon de savoir ce qui fait qu'on est français »

Publié le 8 Avril 2010 par Interview Le Parisien - V Mongaillard et L. Le Fur in Action présidentielle et gouvernementale

Fadela-amara.jpgFadela Amara, secrétaire d'Etat à la Ville, réunit ce matin à Nice les principales associations de quartiers. Critiquée, donnée partante du gouvernement, elle s'explique.

 

Après Vaulx-en-Velin en 2008 et Dreux en 2009, c'est au tour de... Nice d'accueillir vendredi, au Palais des congrès Acropolis, le forum Espoir Banlieues, rassemblement annuel des associations des quartiers populaires initié par Fadela Amara. Pour la secrétaire d'Etat à la ville, c'est l'occasion de revenir sur la scène après des mois de discrétion et surtout de tenter de convaincre des centaines de forces vives des cités qui n'ont pas vu beaucoup de changements sur leur dalle depuis qu'elle est au gouvernement. Avant ce grand raout riche en tables rondes, elle défend dans nos colonnes sa politique, Nicolas Sarkozy mais aussi le débat sur l'identité nationale particulièrement critiqué en banlieue. Elle revient aussi sur les rumeurs de son départ qui ont circulé juste avant le remaniement ministériel.

 

Quel nouveau message souhaitez-vous adresser ce matin à tous les acteurs de la banlieue réunis à Nice et qui attendent de véritables changements dans leurs cités ?

Fadela Amara. Les quartiers ne doivent pas toujours être dans le rattrapage, il faut aussi qu'ils soient moteurs dans certains domaines pour ne plus être regardés comme des boulets de la société. Je pense à la formation professionnelle, au numérique, à l'éducation. Je propose que dix établissements classés en ZEP soient choisis pour y expérimenter des projets pédagogiques novateurs. On peut par exemple décider dans un lycée que les jeunes iront le matin en classe et que l'après-midi sera consacré aux sorties culturelles, à la pratique de la musique ou du sport, comme cela se fait en Allemagne. Il est urgent de créer des dispositifs qui redonnent envie aux jeunes d'aller en cours. L'école doit être un plaisir.

 

Faut-il poursuivre le débat sur l'identité nationale ?

Sur la forme, je regrette certains dérapages. Mais sur le fond, je suis d'accord avec ce débat. Il doit se poursuivre même si la priorité des priorités pour les Français, ce n'est pas ça mais plutôt les fins de mois difficiles. Il est bon de savoir qu'est ce qui fait qu'on est Français. Y compris pour moi, par exemple, qui pratique le ramadan, même pendant un conseil des ministres !

 

Mais pourquoi tant le défendre alors qu'il est si controversé et mal compris dans les banlieues ?

Je veux qu'on me regarde comme étant une personne qui participe au pays et qui respecte les valeurs de la République. Avec ce débat, on lutte contre les discriminations et les injustices. Le vivre ensemble a toujours besoin d'être remis sur le tapis. Il ne se décrète pas, il se construit. Il ne faut pas avoir peur. Une certaine France doit évoluer sur sa perception des gens qui viennent d'Afrique ou de Turquie. Ces deux France qui se regardent en chiens de faïence vont pouvoir se rencontrer à travers les débats sur l'identité nationale. Lors d'un déplacement dans le Nord, j'ai rencontré une famille de mineurs qui, durant le casse-dalle, m'a dit : "On a voté extrême droite parce qu'on a peur de l'avenir". Mon boulot, ce n'est pas de la stigmatiser mais de la convaincre. Elle ressemble tellement à mes parents, elle a les mêmes fleurs en plastique, le même tapis avec des cerfs, les mêmes bibelots ramasse-poussières. Je me refuse de rejeter les électeurs du Front national. J'ai toujours considéré que notre pays n'était pas raciste.

Beaucoup de jeunes dans les quartiers ne se sentent pas Français alors qu'ils sont nés sur le sol hexagonal...

Il faut se battre pour qu'ils aient un sentiment d'appartenance à la nation française. Porter celui-ci avec fierté n'est en aucun contradictoire avec l'histoire individuelle de chacun. Les jeunes qui sortent avec un drapeau algérien et sifflent la Marseillaise, il faut leur apporter des réponses, ils expriment un malaise.

 

Ali Soumaré, victime de fausse allégations sur son casier judiciaire durant la campagne des régionales en Ile-de-France, ça vous choque ?

Il y a des dérapages graves qu'il faut bannir. Quand il y a une crise majeure dans notre pays, la tentation du bouc émissaire revient. En 1991, lors de la guerre du Golfe, je me souviens avoir rasé les murs, avoir entendu des quolibets du genre "Les bougnoules, vous prenez les boulots de nos enfants".

 

Que répondez-vous à ceux qui affirment que la défaite de la droite aux régionales est liée à la politique d'ouverture de Nicolas Sarkozy dont vous êtes l'ambassadrice ?

Quand il y a un problème dans notre pays, on cherche toujours des boucs émissaires. C'est trop facile. L'ouverture n'a eu aucune espèce d'incidence. Aujourd'hui, il y a un homme qui s'appelle Sarko et qui a fait de la diversité un vrai concept. Il faut saluer son courage. Avant, chacun plaçait ses mecs quand il arrivait, on était dans une logique de pouvoir. L'ouverture, c'est une manière moderne de faire de la politique, loin des sectarismes d'antan.

 

La rumeur vous donnait sur le départ juste avant le remaniement ministériel d'après-régionales. Comment l'avez vous vécu ?

Je vais être honnête avec vous : j'ai appris par la presse que mon nom était cité. Mais j'ai continué à travailler tranquillement, comme d'habitude. Je n'étais pas stressé, je me disais juste que si jamais je sortais, le travail n'était pas fini. Beaucoup de gens n'ont pas compris qui je suis, à quel point je suis déterminée. Ils ne connaissent pas mon caractère. Je n'ai jamais rien lâché dans les combats que je mène.

 

Avez-vous appelé Nicolas Sarkozy pour lui demander de rester au gouvernement ?

Vous rigolez ou quoi? Je n'ai jamais passé un coup de fil à l'Elysée ou à Matignon à des fins personnelles, pour quémander. Quand j'appelle, cela concerne mes responsabilités au gouvernement. La seule chose que j'ai faite, c'est de convoquer mon directeur de cabinet pour lui demander de recevoir chacun de mes conseillers afin de répondre à la question : "Si demain, on sort, comment les aider ?"

 

Dans l'entourage de François Fillon, notamment, on vous reproche d'être «incompétente». Cette attaque vous touche-t-elle ?

Si ça peut éviter à leurs auteurs de s'endormir sans prendre de Lexomyl! En tout cas, François Fillon ne me l'a jamais dit. Tout ça, c'est de la politique... Je subis le fait d'être femme et de venir des classes populaires. Quand je suis arrivée au gouvernement, je ne connaissais pas les codes. Je les ai appris mais il reste des choses que je ne veux pas changer.

 

Faut-il supprimer le bouclier fiscal ?

C'est une question compliquée. Ça me parle quand j'entends à l'Assemblée des députés qui veulent le supprimer ou le suspendre. Mais c'est une mesure phare de la politique du président. Je jugerai sur les résultats.

Des amis riches, dont je tairais le nom, m'ont dit : "Si on l'enlève, on repart". Ce qui me scandalise en fait, ce sont les bonus versés aux dirigeants de banques qui avaient été renflouées durant le tsunami de la crise. Je suis pour la taxation de ces bonus.

 

Le Conseil d'Etat a écarté toute interdiction totale du voile intégrale. Partagez-vous son avis ?

Non, moi, je préfère qu'on soit ferme, je suis donc pour une interdiction totale. Il faut légiférer pour éviter que des filles basculent. Certains disent : "Oui, mais si on fait ça, on stigmatise". Je leur rétorque que derrière la burqa, il y a la mort sociale, une atteinte à la dignité, à l'émancipation. La buqua n'a rien à voir avec l'Islam, ce n'est pas un signe religieux. Moi qui suis musulmane, je combats cet asservissement total. Je ne veux plus voir de burqa dans notre pays, il faut la pourchasser. Sur cette question, on ne doit pas avancer de deux pas puis reculer de trois... Je fais confiance aux députés pour que le texte soit le plus efficace, qu'il éradique enfin la burqa. Il est important que la République s'arme pour casser cette dynamique. On est parti de quelques femmes qui portaient le voile intégral à 2000 aujourd'hui. Si on ne fait rien, le nombre augmentera.

 

Un bus a été incendié à Tremblay (Seine-Saint-Denis) la semaine dernière deux jours après la saisie dans un quartier de la ville d'un million d'euros en liquide, du cannabis et de la cocaïne par la police. Qu'est ce que cela vous inspire ?

Je suis pour un nettoyage de l'insécurité dans les quartiers. Ces mères qui ressemblent tellement à la mienne doivent pouvoir se réveiller le matin ou faire leurs courses sans avoir la trouille au ventre. Il faut se désolidariser de cette minorité, de ces voyous qui alimentent les économies parallèles. Il faut faire la guerre aux phénomènes de bande et aux trafiquants de drogue qui tuent les cités! Car ces mecs à la tête des trafics sont sans pitié quand ils enrôlent des guetteurs de 12 ans. Ce n'est pas parce qu'on est pauvre qu'on peut faire n'importe quoi. Les excuser tout le temps, c'est le meilleur moyen d'aller vers l'escalade. La vraie bataille, c'est la sécurité même si n'est pas politiquement correct de dire ça. L'ordre républicain est émancipateur.