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Un Républicain de Guingamp

Site de Philippe LE ROUX, ancien Délégué de la quatrième circonscription des Cotes-d'Armor et Conseiller chargé des grands projets auprès de la Direction de l'UMP

Référendums en Martinique et en Guyane le 10 janvier

Publié le 6 Janvier 2010 par Philippe LE ROUX - Délégué de la Circonsription in Action présidentielle et gouvernementale

Les Martiniquais et Guyanais se prononceront le 10 janvier, un an après une crise sociale sans précédent aux Antilles, lors de référendums aux résultats incertains, sur l'avenir institutionnel de leurs départements, avec à la clef une possibilité d'autonomie accrue.

Alors que les responsables locaux ont été majoritaires à souhaiter un changement statutaire de ces deux départements-régions, ces consultations constitueront un test pour la confiance des populations en leurs élus et pour la "relation rénovée avec la métropole" prônée par Nicolas Sarkozy.

Organisées deux mois avant les régionales, maintenues dans ces territoires, ces scrutins interviennent aussi six ans après le "non" de la Guadeloupe et de la Martinique aux référendums qui proposaient la création d'une collectivité unique groupant conseil général et conseil régional.

La question posée en janvier aux Martiniquais et Guyanais est d'apparence technique: souhaitent-ils passer de l'article 73 de la Constitution (régissant les DOM), au 74 qui encadre les autres territoires ultramarins (Nouvelle-Calédonie étant un cas à part).

Cet article 74 permet, dans le cadre de la République, des adaptations aux "intérêts propres" de chaque collectivité, et donc, éventuellement, plus d'autonomie.

En cas de non, Guyanais et Martiniquais retourneront aux urnes le 24 janvier pour décider ou non de la mise en place d'une collectivité unique exerçant les départementales et régionales, tout en restant sous article 73.

En cas de oui, Guyane et/ou Martinique rejoindraient les autres Collectivités d'Outre-mer sous article 74.

Une loi organique définirait dans la foulée leur organisation institutionnelle respective et déterminerait les domaines dans lesquels la législation nationale serait maintenue, en particulier sur le plan social.

S'appuyant sur Saint-Barthélemy et Saint-Martin, le Sénat a souligné que le passage à l'article 74 "n'impliquerait pas automatiquement et nécessairement la remise en cause des lois et droits sociaux".

Pour le constitutionnaliste Guy Carcassonne, "il n y a pas de fossé aussi irréductible qu'on le croit" entre les articles 73 et 74. Mais à ses yeux, le "sujet essentiel" est le contenu de la future et éventuelle loi organique.

"Les modalités de la consultation sont bien singulières : on vote d'abord et le contenu de la loi organique est connu après", a déploré le député martiniquais Serge Letchimy (PPM), se prononçant contre l'article 74, "tel que rédigé aujourd'hui".

Sous ce débat apparemment juridique, se cache, selon la ministre de l'Outre-mer Marie-Luce Penchard, le "véritable enjeu" du "développement économique et social".

Soixante ans après la départementalisation, la richesse par habitant est de 20.000 euros en Martinique et de 14.000 euros en Guyane, contre 30.000 euros pour la France entière (chiffres 2007).

En 2008, le taux de chômage était de 22,4% en Martinique et de 20,6% en Guyane.

Mme Penchard a assuré qu'en cas de passage à l'article 74, le gouvernement "prendra naturellement en compte" le vœu des élus que ce qui relève de la "protection sociale" continue à demeurer de la compétence de l'Etat.

Partisan du passage à l'article 74, le sénateur apparenté PS Claude Lise, président du conseil général de Martinique, affirme revivre "le scénario catastrophe" de 2003, avec une "dramatisation portée à son comble".

Selon un sondage Louis-Harris-DOM pour France-Antilles, la tendance serait en Martinique à la victoire du non le 10 janvier et à celle du oui le 24 janvier.

 En Guyane, le scrutin du 10 paraît serré, selon plusieurs sources ultramarines.

 

Referendums statutaires dans deux des quatre DOM seulement

Les référendums sur l'avenir institutionnel des DOM ne concernent que la Martinique et la Guyane, les élus de Guadeloupe préférant attendre un apaisement du climat social après la grave crise de janvier et février 2009.

La Réunion a écarté la perspective de tout renforcement de son autonomie "normative" et ses élus ont obtenu qu'une disposition spécifique soit introduite dans la Constitution à cet effet.

Fortement déstabilisés par la crise de 44 jours qui a touché la Guadeloupe, les élus du département, réunis en juin en congrès ont opté pour l'élaboration, durant douze à dix-huit mois, d'un "projet de société".

Ils ont "demandé à l'Etat de ne pas engager de modification institutionnelle ou statutaire qui ne serait pas compatible" avec ce projet.

Dix ans plus tôt, rappelle le politologue Fred Constant, la Guadeloupe était "à l'avant-garde d'une demande d'autonomie accrue", "à l'initiative de la sénatrice Lucette Michaux-Chevry".

"Adoptée en 1999, la +déclaration de Basse-Terre+ préfigurait les changements statutaires en discussion aujourd'hui dans les seules Martinique et Guyane", ajoute M. Constant dans un dossier de la Documentation française.

L'évolution institutionnelle différenciée des DOM repose sur un principe formulé par Louis Le Pensec, ministre de l'outre-mer en 1988, réaffirmé par Lionel Jospin, puis repris par Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy.

Outre la distinction entre départements-régions d'outre-mer (DOM-ROM: Guadeloupe, Martinique, Guyane et Réunion) et collectivités d'outre-mer (COM), la Constitution distingue désormais sept cas.

Quatre dans l'article 73, qui régit les DOM-ROM, soumis aux mêmes règles juridiques que la métropole, et trois dans l'article 74, dont relèvent les collectivités (Polynésie française, Saint-Pierre-et-Miquelon...) et qui ne sont pas soumises aux mêmes règles, pour tenir compte de leurs intérêts propres.

Ce principe de spécialité législative peut donner lieu à une autonomie normative.

Avec les collectivités à statut particulier, comme la Nouvelle-Calédonie où un référendum sur la pleine souveraineté est prévu entre 2014 et 2018, on atteint la dizaine de statuts.

L'article 73 prévoit pour les DOM-ROM la possibilité de créer une collectivité unique se substituant au département et à la région, ou une assemblée délibérante unique pour ces deux collectivités, sous réserve du consentement des électeurs.

L'instauration d'une collectivité unique en Guadeloupe et Martinique a été repoussée lors d'un référendum le 7 décembre 2003.

La Constitution prévoit aussi des "passerelles" d'une catégorie à l'autre, pour tout ou partie d'une collectivité. Ainsi Saint-Barthélemy et Saint-Martin, dépendances de la Guadeloupe, ont choisi de s'en séparer le 7 décembre 2003 et de devenir chacune une COM.

En mars 2009, les électeurs de Mayotte ont choisi, à 95%, la transformation de la collectivité départementale, régie par l'article 74, en collectivité unique régie par l'article 73 et exerçant à la fois les compétences départementale et régionale.

 

Marie-Luce Penchard invite à voter

La ministre de l'Outre-mer Marie-Luce Penchard invite les électeurs martiniquais et guyanais à participer dimanche aux referendums sur l'avenir institutionnel de leurs départements, avec à la clef une possibilité d'autonomie accrue, dans une interview à paraître jeudi dans les éditions locales de l'Express.

"L'Outre-mer a besoin de réponses et de stabilité. Je souhaite que le choix, quel qu'il soit, soit franc et clair!", affirme Mme Penchard.

Mme Penchard souligne que "si l'on est pour le 73, il faut absolument aller voter contre le 74, car si, en cas de forte abstention lors de la première consultation, le 74 passe, c'est terminé".

"Ce n'est pas un scrutin à deux tours. Chaque vote a une conséquence", dit-elle. "Il ne faudrait pas que le +oui+ ou le +non+ gagne avec une faible majorité ou une faible participation, cela signifierait que le débat n'a pas rencontré une large adhésion".

La ministre souligne qu'en cas de non le 10 janvier et de oui, le 24, une loi "ordinaire" et non pas organique créerait "une seule collectivité qui disposera des compétences du département et de la région", comme à Mayotte.

Ce système diffère de la réforme territoriale prévue pour les départements et régions de métropole, où il y aura toujours un conseil général et un conseil régional, avec les mêmes élus et maintien des départements et des régions.

En cas de double non les 10 et 24 janvier dans les deux départements, cette réforme s'appliquerait aussi en Martinique et Guyane.

A quatre jours du scrutin, Mme Penchard répète que "le gouvernement ne prendra pas parti" pour une consultation demandée par les élus locaux.