Aujourd'hui. Présentation à la presse des mesures préconisées par chaque groupe de travail. Pour chaque proposition, présentation des éventuels obstacles, juridiques, sociaux, techniques ou budgétaires.
Jusqu'à la mi-octobre. Tournée de réunions en province. Les propositions des groupes de travail sont présentées dans une quinzaine de villes. Des chats et des forums sont ouverts aux Français qui veulent donner leur avis sur le site Internet dédié : www.legrenelle-environnement.fr.
Mercredi 3 octobre. Déclaration du gouvernement suivie d'un débat sans vote devant le Parlement, après la traditionnelle séance des questions.
Fin octobre. Présentation d'une synthèse des débats, avant la convocation officielle du Grenelle. ONG, syndicats, patronat et représentants de l'Etat se retrouveront alors pour dresser un programme d'une vingtaine d'actions concrètes et d'objectifs chiffrés
En cinq ans, les choses ont beaucoup changé :
Si 93 % des Français se déclarent prêts à faire un geste pour la planète, ils sont moins d'un sur deux (49 %) à se dire plutôt optimistes quant à l'issue du Grenelle de l'environnement. Cet optimisme très mesuré, révélé par un sondage commandé par le ministère de l'Ecologie, ne doit pas masquer la prise de conscience qui s'est opérée dans le grand public depuis quatre ou cinq ans. Et notamment depuis la canicule d'août 2003, qui a fait 15 000 morts, et frappé les consciences.
« Cet événement a changé la façon dont nous appréhendons les sujets écologiques. Cette année, le film d'Al Gore sur la planète (Une vérité qui dérange) et l'irruption de Nicolas Hulot pendant la campagne présidentielle ont été de vraies piqûres de rappel », analyse Michèle Pappalardo, présidente de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), qui attend beaucoup du Grenelle.
Même si les petits gestes du quotidien paraissent insuffisants au regard de l'ampleur du dérèglement climatique, l'évolution des comportements est tout à fait notable. Quinze ans après l'entrée en vigueur de la loi, près de sept ménages sur dix trient aujourd'hui leurs déchets, observe l'Insee. Dans les salons, les halogènes, ringardisés car trop gloutons en électricité, sont peu à peu remplacés par des ampoules basse consommation, quasi introuvables dans les rayons il y a cinq ans. D'autres études montrent que 83 % des Français éteignent les appareils électriques au lieu de les laisser en veille, 56 % utilisent moins leur voiture et se déplacent à pied, et 32 % seulement préfèrent le train pour voyager.
6 gestes pour sauver la planète
A la maison
Isolation à tous les étages. Jean-Louis Borloo souhaite un grand programme de rénovation et d'amélioration de l'isolation des logements et bâtiments, très voraces en énergie. La Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment a évalué hier à 600 milliards d'euros le coût de la rénovation des 31 millions de logements existants, soit en moyenne 15 000 à 20 000 € par foyer.
Pour Jean-Louis Borloo, les « spécialistes » des économies d'énergie pourraient intervenir directement chez les particuliers pour leur donner des conseils.
Dans les champs
Un moratoire sur les OGM. Le président s'y est lui-même engagé : il y aura à terme moins de pesticides lâchés sur les terres agricoles. Une mesure qui sera jugée centrale après le scandale récent des pesticides aux Antilles (lire page 13). Quant aux OGM, le débat reste ouvert... et houleux. Jean-Louis Borloo a promis une loi mais ne peut pas l'annoncer aujourd'hui au risque de faire capoter les discussions avec les agriculteurs. Hypothèse probable : un moratoire des cultures en plein champ de maïs transgénique. Mais les recherches sur les OGM seraient poursuivies.
Au volant
Maxi 120 km/h sur l'autoroute. Les associations militent pour que la vitesse soit réduite de 10 km/h sur toutes les routes afin de limiter la pollution. Les nouvelles voitures mises sur le marché seront à terme moins polluantes grâce à l'application de nouvelles normes d'émissions de C02. La Fondation Nicolas Hulot propose enfin un système de vignette verte fonctionnant sur le principe du bonus-malus qui taxerait davantage les automobilistes roulant dans les véhicules les plus polluants, et inversement pour les plus vertueuses.
Au supermarché
Des étiquettes écolos. Jean-Louis Borloo voudrait généraliser un système de double étiquetage « écolo » comme l'envisage déjà une grande enseigne de distribution (Casino). Sur l'emballage de chaque produit figurerait le prix en euros et son coût « environnemental » : production de CO2 nécessaire pour acheminer les ingrédients, capacité à recycler l'emballage, etc. Les associations voudraient de leur côté un étiquetage systématique des produits électroménagers (téléviseur, ordinateur) en fonction de leur consommation d'énergie.
Dans votre assiette
Du bio à la cantine. Le gouvernement veut relancer l'agriculture biologique et faire en sorte que chaque élève ait accès quotidiennement à des menus bio dans les cantines. Les surfaces cultivées seront développées et les sociétés de restauration collective pourraient bénéficier d'aides financières à l'approvisionnement en produits bio ou de qualité. « En Italie, ils ont beaucoup plus de bio que nous et ce n'est pas plus cher, constate Jean-Louis Borloo. Il faut juste un accord pour mieux organiser toute la chaîne de la production jusqu'à l'assiette. »
A l'école
Biodiversité au programme. Le ministre de l'Agriculture, Michel Barnier, souhaiterait sensibiliser les enfants au sein de l'école, dès le plus jeune âge, à la nutrition pour leur apprendre à « bien manger ». La Fondation Hulot va plus loin en souhaitant la mise en place de campagnes de communication visant à « écoalphabétiser l'opinion ». A côté des cours d'histoire et de géographie dispensés au collège et au lycée, l'idée consisterait à parler aux élèves d'écologie et notamment de l'importance de la biodiversité.
Interview de Jean-Louis BORLOO, ministre de l'Ecologie
Ministre d’Etat en charge de l'Ecologie, du Développement et de l'Aménagement durables, Jean-Louis Borloo a la responsabilité de conduire à bon port le Grenelle de l'environnement.
Les gens se demandent ce qu'est, au juste, votre « Grenelle de l'environnement ».
Jean-Louis Borloo.
C'est le rassemblement de tous les acteurs de la société : les entreprises, les syndicats, les collectivités territoriales, les ONG et, bien sûr, l'Etat. Déjà 1 000 heures de débats, 53 réunions, de nombreuses confrontations : des propositions concrètes vont être maintenant soumises aux Français sur Internet et dans des forums régionaux. Objectif : sauver la planète. Car c'est possible à condition que tout le monde s'y mette.
Vous, que faites-vous ?
Chez moi, j'ai déjà installé partout des ampoules basse tension, et j'ai commandé un audit énergétique. C'est un début. Des gestes, on peut en faire à toute heure : mieux gonfler ses pneus de voiture, éteindre sa télévision au lieu de la laisser en veille, prendre le tramway ou le vélo plutôt que la voiture. Sauver la planète, c'est l'affaire de tous au quotidien.
Cette bataille peut-elle être vraiment gagnée ?
Oui, si tous les acteurs bougent en même temps. Chaque jour, chacun est amené à voter au moins cinq fois pour ou contre la planète...
Vous exagérez !
Pas du tout ! Il prend ou non les transports en commun. Il organise ou non des visioconférences. Il achète ou non un produit hors saison qui vient du bout du monde. Il prend ou non un sac plastique chez son commerçant. Chaque fois, j'insiste, il arbitre pour ou contre la planète. La révolution est en marche.
Pourtant, les débats restent parfois houleux !
C'est normal. S'il y avait un consensus sur tout, ce serait suspect. Je salue aujourd'hui l'engagement de tous ceux qui ont participé aux groupes de travail. Il y a eu plus de mille heures d'échanges ! On avance, il y a quelque chose qui nous dépasse, une envie de faire...
De faire quoi ?
Tout le monde est d'accord, par exemple, pour sortir des « passoires énergétiques » que sont nos bureaux et nos logements. L'énergie dépensée, selon les saisons, pour chauffer ou refroidir les pièces, c'est de la folie ! Tel qu'il fonctionne aujourd'hui, notre modèle ne peut plus durer.
Au rythme actuel, combien de temps peut-on tenir ?
Un maximum de vingt-cinq ans. Il ne s'agit pas de casser la croissance, mais d'en changer.
Pour beaucoup, la défense de l'environnement reste un luxe...
Faux. Ce n'est pas un luxe de manger des fraises à la bonne saison ! Jusqu'ici, l'écologie, c'était un système marginal qui semblait contrarier nos projets personnels. Il faut que ce thème devienne central, et que ce soit un projet à la fois individuel et collectif.
Mais qui va décider de ce qu'il faut faire ?
Les Français... Dès maintenant, ils peuvent intervenir sur notre site Internet. A la fin, il y aura un débat au Parlement. Tous ensemble, nous proposerons alors des programmes d'action, mais rien ne se fera si les citoyens n'en ont pas envie. J'appelle donc chacun à se mobiliser. Je sais, notamment, que je peux compter sur l'immense armée des moins de 20 ans. Ni eux ni leurs enfants n'ont envie d'un réchauffement de la planète de 4 degrés, avec toutes les conséquences qu'on imagine.
Bref, le statu quo est exclu ?
Nous sommes de plus en plus nombreux sur une planète étroite, aux ressources limitées. Il faut donc qu'on bouge. Et l'Etat doit être évidemment exemplaire.
Si vous aviez un message à lancer...
Je dis aux Français : « Emparez-vous du débat. » Il ne s'agit pas d'une discussion d'experts. A l'arrivée, ce ne sera pas le succès d'un gouvernement ou d'un ministre, mais de tous.